Les embûches des bûches |1

Starck attaque

Chaque année, même topo. Ca bûche ferme en pâtisserie pour savoir comment achever ces agapes en gardant un morceau de souvenir pour un tour complet de calendrier. A cette heure, les éditions limitées des rondins pâtissiers ont été largement digérées. « Air, eau et feu » d’Hevin, « 2000 feuilles » d’Hermé (89€), « Rêve » de Lenôtre (98€), « Tapis Rouge » de Michalak (118€ !) et autres «Beaux sapins » ont au mieux , intégré la mémoire gustative catégorie « mm, c’était bon», au pire celle de « m, c’était beau ».

Mais y’en a qui ont encore le billot sur l’estomac. Le milieu du design n’a pas rangé la scie. Appelés à la rescousse de la création, les designers y vont chaque Noël de leur joujou culinaire. Florence Doléac cette année, Patrick Jouin l’an dernier chez Häagen Dazs, Starck en 2006 chez Lenôtre, etc. Dans des réponses plus ou moins pertinentes, celle de Mr Good Goods – une bûche, en bois, au goût du bois…- était l’évidence même, comme souvent dans le design bien fait.

Trois ans plus tard, cette image de bloc fraîchement scié nous est fatalement revenue à l’esprit devant le parallélépipède signé Pierre Hermé. Le design crie au plagiat, toise les facultés créatrices des chefs, dépouille le culinaire de toute aptitude novatrice. Tandis que le cuisinier ignore le copyright, le designer prétend à citer les référents.

Elevé sur des sommets enneigés, où «l’agence Starck a décidé d’aller réfléchir », celle ci a lancé du télésiège un laconique et anti polémique, « nous apprécions Mr Hermé pour son œuvre ainsi que personnellement ». So…Pierre Hermé qui n’a travaillé en design qu’avec Yan Pennor’s (en 93. Cerise sur le Gâteau) s’est de son côté fendu d’une justification spontanée, que je vous livre telle qu’il me l’a donnée.

« Il faut porter à la connaissance de Philippe Starck un peu d’histoire récente de la pâtisserie. En 1987, j’ai crée un gâteau avec décor faux bois, le Paradis, à l’époque chez Fauchon. En 1989, j’ai crée la première bûche faux bois, La bûche Paradis. En 1988, j’ai crée avec Monsieur Daudignac de la société Matinox, le matériel pour faire du faux bois en pâtisserie à grand échelle. En 2002, j’ai fait ma première bûche carrée avec embouts de bûche carrés, la « bûche Carré Blanc ». Cette année, j’ai décidé de faire une bûche millefeuille, j’en ai pas vu encore chez mes confrères ! La « bûche 2000 Feuilles », habillée de faux bois et décorée des traditionnels lutins et scie, revus et corrigés en plexiglas. Le tout designé par le « Pierre Noel » ! En fait je n’en veux pas à Philippe Starck d’avoir, en 2006 utilisé le faux bois pour la bûche Lenôtre, il ne pouvait pas savoir. La pâtisserie est mon métier et la création mon credo depuis toujours. » Pierre Hermé

Il ne pouvait pas savoir… Aïe ! Aïe ! Aïe ! Ca doit grincer dans les sommets du Network. Mauvaise conscience des uns, dédain des autres, c’est pas encore gagné pour que design et cuisine bûchent ensemble.

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