Le relais 50: l’OVNI du Vieux-Port

relais-50-marseille-emmanuel-perrodinL’hôtel la Résidence a pris un grand coup de jeune il y a deux ans. Et son restaurant de même! Depuis qu’Emmanuel Perrodin a repris les cuisines, les marseillais redécouvrent qu’il y a un restaurant de ce côté là du Vieux Port. Et le Relais 50 est un OVNI! Enfin attablée à la table de cet autodidacte, je découvre une cuisine qui n’a pas d’équivalent à Marseille. Comme très souvent les chefs qui ne sont pas passés par le sérail des écoles hôtelières mais ont tout appris sur le tas (pour lui, Perron, aux 1ères heures, puis l’essai avorté du 6 Quai des Epices d’Arnaud Carton de Grammont), signent des plats qui ne ressemblent à aucun autre. On est déroutés par leurs créations qui n’ont aucun référent. Même si Emmanuel Perrodin a décortiqué tout seul tout l’Escoffier, l’ouvrage historique régulièrement cité par Thierry Marx. Ils osent des présentations comme si chaque plat était un nouveau terrain d’essai. Des fois c’est un peu Loisir et création, d’autres, le montage donne envie de tout casser et foncer dans le plat sans attendre.

marseille-relais-50-emmanuel-perrodinLa carte du Relais 50 est courte et ne laisse pas grand chose de côté. Chaque intitulé interpelle. Emmanuel Perrodin aime le lait, alors il y a beaucoup, sous toutes ses formes, pas inutile, bien au contraire, en fromage un peu aigre, en yaourt attendrisseur, en brousse salée sucrée. Il aime aussi le poisson, les produits locaux, tout se retrouve dans sa cuisine. On finit par céder au tartare de chinchard (que l’on vient de voir sur le port). Le chinchard est comme le mulet et quelques autres: poisson très bon marché trop souvent méprisé, il ouvre soudainement là, cru (uniquement!), bien assaisonné, relevé au poivre timut et trempé dans son lait fermier, de nouvelles perspectives au palais. Le boeuf mariné (un peu comme un lendemain de pot au feu), gambas, langue d’oursin et tapioca est de ceux qui excitent car ils sont complètement insolites. La bonite en tataki et falafel comme à Damas est elle aussi extraite d’un cerveau culinaire bien fait. Les coeurs d’artichauts en poivrade croquent sous la dent, le falafel est totalement moyen oriental et la bonite mi cuite. Trois plats en un qui fonctionnent parfaitement ensemble. Jamais je n’aurais tenté un truc pareil! Le carré de porcelet est cerné par un gros bras de poulpe. Les deux bestioles se rencontrent sur une cuisson lente, un peu trop à mon goût: on s’enfonce dans des mous trop faciles à manger. Au dessert, religieuse caramel beurre salé et wasabi, croustillante et toute fraiche. Un nouveau détournement de saveurs à la Perrodin: ca pique, c’est singulier, ca énerve quand on peut pas mettre dans des catégories. Mais c’est ça qui est bien! La carte des vins affiche comme la cuisine, l’honnêteté de la maison: un Cuilleron à 23€, des Révelette à 30€ et un petit rosé bio du Ventoux qu’on pourrait bien reprendre en double. Service efficace et pro: un truc de dingue sur le Vieux-Port… On reviendra pour l’ambitieuse bouillabaisse d’Emmanuel (50€. A commander 48h à l’avance) : encombrée de 2 petits enfants, la table d’à côté ne s’en sort pas de ces plats de poisson qui se succèdent. On a envie de prendre un croûton et de les aider à avancer.

 

PS: à noter qu’Emmanuel Perrodin reçoit demain soir, le 13 mai, Georgiana Viou pour un mix marseillo-beninois