Vin nature? Gault go go

©LauraVidal

©LauraVidal

Hier soir, c’était la grande party du Fooding. Ah non, pardon, c’était la grande cérémonie du Gault & Millau. Bref, c’était les 2 en même temps. Allez savoir lequel s’est dit qu’il allait « posséder charnellement » (niquer, ça fait vulgaire) l’autre… J’ai bien ma petite idée là dessus mais là n’est pas le propos de mon post. Ce post, il est consacré au prix du sommelier de l’année, autrement dit, à Laura Vidal. Peut-être par chauvinisme – Laura Vidal est sommelière à Marseille – mais surtout pour la raison que je vais vous exposer. Prix qui arrive à point: la Mercerie ouvrira au printemps sa cave annexe de la mercerie. Un dé à coudre de 8m2 où l’on ne boira que des vins nature et des cochonnailles de Harry Cummins.

Plusieurs lectures possibles en effet à ce prix Sommeliers de l’année 2020:
- la lecture féministe : « apparemment, une femme peut être meilleure sommelier de l’année« , clame la victorieuse. On serait tenté de le croire que mais à vrai dire, Laura partage le prix de la sommellerie avec Julien Meurillon, homologue masculin et montpelliérain. L’effet parité annule l’effet women first. Exit donc la bonne conscience me too du Gault.
- la lecture marseillaise : Marseille power, la ville a le vent en poupe à Paris. Oui, je l’avais écrit à son ouverture, la Mercerie ancre un nouveau paysage de la restauration marseillaise. Ici par contre, on commémorait ce matin, la mort de 8 personnes enfouies sous 2 immeubles effondrés en plein centre ville il a tout juste un an. Aucun politique inquiété. Marseille ne change pas tant que ça. Exit l’effet Marseille.
- la lecture Fooding: « à vrai dire on est plutôt Fooding’s style« , soulevait Laura Vidal prenant presque étonnée le train pour le Moulin Rouge et non pour la soirée Fooding au Président. Cela fait quelques années en effet que le guide opère un lifting. Tour de France des jeunes talents, Alexandre Mazzia Cuisinier de l’année 2019, etc. Mais listons les prix 2020: un trois étoiles chef 2020, une liste de primés qui sent bon la bonne gastronomie  française de l’Unesco (Blanc, Savoy, Trama, etc). Exit Gault & Millau le nouveau jeune vieux guide donc.
- la lecture branchée : « c’est un coup de coeur pour cet établissement en ébullition, il y a toujours un monde de fou« , voilà ce que déclarait le red chef du guide hier soir sur scène. Une analyse fort pertinente qui pose néanmoins question: les mecs, vous avez récompensé « la sommelière au centre de ce bouillonnement » ou son restaurant??? Donc, exit l’effet wahou jeune cuisine.
- la lecture à moi que j’aime: bien que le mot n’ait jamais été prononcé dans cette remise de prix, le prix du sommelier 2020 du Gault & Millau récompense le vin nature! Peu de sommeliers incarnent en ce moment aussi bien ces jus naturels que Laura Vidal. La carte de la Mercerie est à 110% nature. Stakhanoviste sans être sectaire, partisane mais didactique, la canadienne ne fait aucun écart sur ces choix. La Mercerie est sans doute l’unique restaurant marseillais à imposer ses seuls vins là. Comme il ne fait aucune mention des mots « vin nature » et qu’il souhaitera sans doute continuer à ménager le souffre et le sans souffre, on soupçonnera le guide soit d’être passé à coté de l’info primordiale – j’en doute – soit d’avoir simplement effleuré la touche bonne conscience de son ordinateur. A l’heure de la vitesse des réseaux sociaux, le Gault & Millau n’a toujours pas eu le temps de répondre à mes questions.

A suivre : ITW Laura Vidal – « ce prix récompense une façon d’aborder le vin » et Antonin Iommi-Amunategui -  « Pour le Gault & Millau, ce prix est une façon de dire, on n’est pas complètement has been« .